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UB- Préhistoire Le site de Préhistoire de l'Université de Bourgogne Cours en ligne Licence 3 - Néolithique européen |
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Néolithique européen Cours 1 : introduction
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Généralement, le Néolithique est conçu et présenté comme une partie intégrante, la dernière, de la Préhistoire. Et dans l’imaginaire collectif, la Préhistoire s’apparente souvent à des espèces « d’hommes-singes » vivant dans des grottes et boulottant de la viande crue à longueur de journée entre deux accouplements plus ou moins consentis comme dans « la Guerre du Feu ». La Préhistoire, cela reste l’âge des cavernes, les âges obscurs de l’humanité et ce n’est sans doute pas un hasard si les expositions les plus récentes montrent les vestiges préhistoriques dans la pénombre… Scénographie stupide s’il en est, dans la mesure où les hommes ne vivaient pas sous terre et que le soleil brillait avec, certes plus ou moins d’intensité selon les périodes et les climats, mais brillait quand même… Le Néolithique, c’est plutôt des villages et même de petites villes, des fortifications, des monuments parfois gigantesques, des sépultures qui le sont tout autant, une statuaire de grande taille… Tout ce qui fait notre civilisation actuelle, est déjà en germe pendant le Néolithique. Commençons par nous placer dans le temps, dans la très longue chronologie de l’histoire humaine. Le principal problème est que cette durée même est très difficile à appréhender par notre petit cerveau, parler de milliers ou de millions d’années, c’est facile, quant à concevoir réellement ces durées, alors que notre échelle de temps est tout à fait différente avec nos pauvres 80 ans d’espérance de vie, dont nous sommes encore fort loin… La représentation classique du temps de la Préhistoire sous la forme d’une très longue frise ou d’une frise découpée avec des agrandissements successifs est à la fois difficile à construire et difficile à lire. Une autre possibilité, que je dois au Professeur Chenorkian de l’Université de Provence, lorsque j’étais moi-même étudiant, est de ramener l’histoire humaine à un an.
Donc lorsque je vous dis que le Néolithique est infiniment plus proche de nous que de la Préhistoire ancienne, ce n’est pas qu’une vue de l’esprit. Imaginez maintenant que nos plus lointains ancêtres directs ne sont plus datés de 3,5 MA mais de 6 ou 7 MA et nous pouvons doubler l’échelle de cette petite représentation : Bon, si vous voyez maintenant un peu mieux ce problème de durée, de chronologie de l’histoire humaine, rapprochons nous du Néolithique en commençant par quelques définitions et concepts basiques : Et tout d’abord qu’est ce que le Néolithique : Le Néolithique, c’est un stade technique plus qu’une période chronologique puisque nous verrons qu’en terme de datation, cela ne se place pas exactement au même moment selon les régions du monde. Ce stade technique, il est définit par 5 éléments principaux : - La domestication des plantes et l’agriculture - La domestication des animaux et l’élevage Ce qui est très important c’est donc que l’homme va à partir de ce moment, non plus prélever sa nourriture sur la milieu comme ces ancêtres chasseurs, pêcheurs, collecteurs, mais la produire et la contrôler, donc rapidement obtenir des excédents et les thésauriser. Attention à un raccourci un peu trop rapide, le passage à l’économie de production avec l’agriculture et l’élevage n’empêchera jamais les hommes de continuer à chasser, à pêcher ou à ramasser des fruits et des plantes sauvages… jusqu’à nos jours. Mais ces activités deviennent peu à peu des activités d’appoint, ou sociales et plus une réelle nécessité. Ces deux innovations vont généralement en entraîner d’autres ou plutôt être liées à d’autres, car il ne semble pas y avoir de mécanisme réel de causalité : - La première que je mentionnerai est la sédentarité, c'est-à-dire que les hommes se fixent généralement à ce moment en un lieu unique ou autour de ce que l’on va appeler une « résidence principale ». - Une autre innovation importante, va être le développement de la céramique, la terre cuite donc qui va constituer le matériau de prédilection pour la fabrication de récipients. Ces récipients devenant nécessaires pour le stockage mais aussi la consommation de la nourriture. Vous n’avez qu’à essayer de manger une bouillie de céréales sans un bol et vous comprendrez rapidement. - Enfin, la nécessité d’aménager des champs pour pratiquer l’agriculture amène à une autre innovation intéressante même si elle est secondaire par rapport aux premières que je vous ai mentionné, qui est le polissage de la pierre. Ce sont donc les 5 points importants de la définition du Néolithique :
Autre subtilité, le Néolithique suppose la réunion de ces différents éléments, au moins en partie, les plus importants étant ceux concernant l’économie de production. Qu’est ce donc que la Néolithisation ? Il s’agit du processus qui mène des sociétés humaines du stade de chasseurs-collecteurs nomades à celui d’agriculteurs-éleveurs sédentaires. Deux exemples :
Autre concept important est la notion de foyer et de diffusion : On distingue des foyers, que l’on dit primaires, ce sont les régions où le Néolithique est apparu ex-nihilo comme le Proche Orient déjà évoqué et des régions de diffusion du Néolithique à partir de ces foyers, comme l’Europe, ce qui explique en partie la différence de durée du processus : au Proche Orient, il s’agit d’inventions successives et liées pour l’essentiel sur un temps très long, puis les colons s’embarquent pour gagner de nouvelles terres et débarquent en Europe en apportant dans leurs bagages un Néolithique tout constitué, c'est-à-dire l’idée des villages, des semences à planter et des animaux domestiques, des céramiques et des haches de pierre polie… Pour compliquer un peu plus la donne, et vous verrez que rien n’est jamais simple en archéologie et surtout pour ces périodes, si les processus de néolithisation dans les foyers primaires ne sont pas identiques dans les diverses régions du monde, il en est de même pour les diffusions qui selon les régions traversées et les peuples rencontrés vont prendre diverses formes, divers rythmes, avec des stagnations importantes et des progressions rapides. Des zones colonisées par les colons eux-mêmes venus d’un foyer primaire et des zones néolithisées par contact, par acculturation. Nous y reviendrons en détail dans quelques temps. Quelques mots maintenant sur la découverte et la définition initiale du Néolithique : En fait les vestiges néolithiques sont sans doute, les premiers vestiges préhistoriques découverts puis reconnus dès le XVIe et le XVIIe siècles. Pendant le XVIIIe siècle, les cabinets de curiosités se remplissent de vestiges néolithiques non encore bien compris en même temps qu’on commence à étudier les monuments mégalithiques généralement attribués aux Celtes. Il faut attendre le début du XIXe siècle pour qu’un certain Christian Thomsen, en 1819, classe les collections du Musée de Copenhague en 3 périodes : Et c’est seulement en 1865 qu’un archéologue et naturaliste anglais, Sir John Lubbock divise l’âge de la pierre entre : Finalement, c’est dans le dernier tiers du XIXe siècle que les archéologues s’intéressent au Néolithique principalement au départ avec la fouille des cités lacustres, les palafittes dans les Alpes essentiellement en France mais surtout en Suisse et en Allemagne, et l’étude des ensembles et des monuments mégalithiques (dolmens, menhirs et autres). Une étape importante est franchie dans les années 1930, lorsque un préhistorien et théoricien australien, Vere Gordon Childe, énonce le concept de révolution néolithique qui est encore utilisé dans les écoles pour parler du Néolithique. Tout ceci semble assez simple. Passons maintenant aux « mais » car il y a toujours un mais quelque part avec les archéologues. Tout d’abord, il existe plusieurs foyers de néolithisation sur la planète. Le Néolithique n’est en aucun cas une invention unique, mais au contraire un semi de petites innovations dans des régions parfois très éloignées et à partir desquelles l’économie néolithique va se diffuser à de très vastes régions. Pourquoi une évolution similaire s’est elle produite en plusieurs points de la planète ? Nous y reviendrons mais retenez déjà que les innovations qui font le Néolithique ont été rendues possibles par une amélioration climatique qui a concerné l’ensemble de la planète. Conséquence de l’existence de ces multiples foyers : la néolithisation a pris des formes différentes sur les différents continents. Différence qui concernent autant les espèces animales et végétales qui vont être domestiquées (évidemment, en fonction des animaux présents localement à l’état sauvage) mais différence aussi dans l’ordre d’apparition de ces différentes innovations qui font le Néolithique. Pour vous donner quelques exemples : Au proche orient, la néolithisation débute par la sédentarisation des groupes et finit par la céramique alors qu’en Amérique du sud, la sédentarisation n’interviendra que bien après la domestication des plantes, et qu’au Japon où la sédentarisation et la céramique apparaissent très tôt, l’élevage et l’agriculture ne seront pas inventés sur place mais seront diffusés à partir de la Chine déjà néolithisée. Vous pouvez donc déjà percevoir que l’histoire de l’apparition du Néolithique, on dit la néolithisation, est une chose complexe. Je vous ai dit que le mode de vie néolithique allait se diffuser à partir des foyers primaires de néolithisation. Mais il se répand en suivant plusieurs routes, avec des phases de colonisation importantes et des zones d’acculturation, de transformation, des populations locales. Très rapidement, il va résulter de cette diffusion des groupes à l’identité culturelle marquée, ce que les archéologues définissent à partir des cultures archéologiques. Ces groupes vont créer des villages, les protéger par des enceintes, contrôler des territoires pour assurer leurs approvisionnements en matières premières. Ils vont entrer en guerre avec leurs voisins, mais aussi créer des alliances et se répandre à travers toute l’Europe à la conquête de nouvelles terres à exploiter pour des groupes toujours plus nombreux. Arrivés au bout de l’Europe, à l’extrême-occident, ne pouvant plus se répandre, faute de terres, ils vont sans doute connaître des crises sociales et/ou politiques importantes. La monumentalité va s’affirmer avec le développement du mégalithisme par exemple pour les sépultures, comme cela avait déjà été le cas au Proche Orient dès la fin du processus de néolithisation, entrainant probablement le début des colonisations lointaines. Au même moment, au sud-est de l’Europe, puis dans les régions méditerranéennes, la maîtrise de ce qu’on appelle les arts du feu, pour la céramique va permettre l’invention de la métallurgie qui va amener de nouveaux systèmes d’échanges puis imposer de nouveaux systèmes de valeur avec le développement d’une identité individuelle en parallèle de l’apparition de réelles fortifications par exemple, qui feront entrer l’Europe dans l’âge du Bronze. Histoire complexe comme je vous le disais, c’est aussi une histoire passionnante, finalement bien plus proche du monde antique que des premiers hommes. Et en même temps c’est une période qui est de mieux en mieux connue par le travail des archéologues. Enfin, retenez comme concept préliminaire important, que si le mode de vie néolithique, l’économie de production, est incontestablement un progrès pour de nombreuses sociétés :
Bibliographie cours 1 – introduction DE LAET S.J. (2000) – Des débuts de la production de nourriture jusqu’aux premiers états : une vision globale, in : Histoire de l’humanité, volume 1 : de la Préhistoire aux débuts de la civilisation, UNESCO, 2000, p. 885-912. GUILAINE J. (Dir.) (1989) – La Préhistoire d’un continent à l’autre, Paris : Larousse, 1989, 288 p. (Essentiels Larousse) GUILAINE J. (1995) – Collège de France – Chaire des civilisations de l’Europe au Néolithique et à l’âge du Bronze, leçon inaugurale, Paris : Collège de France, 1995, 36 p. GUILAINE J. (Dir.) (2000) – Premiers paysans du monde. Naissance des agricultures, Séminaire du Collège de France, Paris : Errance, 2000, 320 p. GUILAINE J. (2005) – Le Néolithique. Naissance des sociétés complexes, Annales. Histoire, Sciences sociales, 60e année, n°5, septembre-octobre 2005, p. 921-952. LOUBOUTIN C. (1990) – Au Néolithique. Les premiers paysans du monde, Paris : Gallimard / RMN, 1990, 176 p. (Découvertes Gallimard)
Cours 1 au format PDF téléchargeable et imprimable
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